France, éducatrice des 4 ans, se préoccupe de certains comportements dans le groupe. Par exemple, elle a observé que Didier ne veut jamais faire autre chose que le coin blocs. Lorsqu’il se retrouve dans un autre coin, comme le bricolage, il manifeste des «pas capables». Juliette désire toujours être la première dans le train, au lavage de mains, à l’habillage, etc. Elle laisse son jeu entrepris lorsqu’elle voit France se préparer pour un changement de routine. Les jeux moteurs finissent souvent par des pleurs, des bousculades et des déceptions quand certains enfants se voient être le dernier ou perdant dans le jeu. Bref, France voudrait bien réussir à contrer les comportements compétitifs au sein de son groupe.

L’enfant de 4 ans manifeste parfois des comportements compétitifs influencés par son environnement (famille / milieu garde) et son tempérament. À cet âge, l’enfant est à la construction de son identité. Il a une fausse connaissance de ses capacités et ses limites et il est difficile pour lui d’analyser de façon critique les causes et effets de ses actions. Il a besoin d’être reconnu des autres par des expériences qui lui permettront de se découvrir et de se définir dans ses forces. Dans cette quête d’identité, l’adulte devient une personne significative pour aider l’enfant à se réaliser. Le langage, le regard, les images que l’adulte renvoient à Didier, Juliette, Pierre-Luc … prennent toute leur importance dans le développement de son identité.

Selon le contexte familial, le rang qu’il occupe et son tempérament, l’enfant peut ressentir de son parent des attentes. Par exemple, Mathis comprend qu’il est valorisé dans ses prouesses motrices où le jeu compétitif prend toute son importance. D’ailleurs, son père parle de lui comme le meilleur coureur au soccer et veut l’inscrire dans le hockey l’hiver prochain. Il est certain qu’il se fera une place dans l’élite en peu de temps. Afin d’être vu et reconnu de son père, Mathis devra performer dans ce que son parent attend de lui. Le milieu familial de Mathis oriente donc ses choix dans ses jeux et comportements avec les autres enfants du groupe.

L’approche de l’éducatrice teinte également les comportements de l’enfant. En effet, les attitudes et les interventions de France peuvent augmenter la compétition au sein du groupe. Voici quelques pistes de réflexion accompagnées d’exemples qui pourront aider France dans l’analyse de ses attitudes.

  • Est-ce que mon vocabulaire est compétitif? Par exemple, le premier rendu au vestiaire, le plus vite, le meilleur, etc.
  • Est-ce que je valorise les idées des enfants dans les jeux libres? Par exemple, Olivier, je trouve que c’est une bonne idée de faire un garage avec une boîte de souliers.
  • Est-ce que je rassure l’enfant dans ses capacités? Par exemple, tu as des petits doigts agiles pour attacher tes souliers.
  • Est-ce que je lui parle de ses expériences ultérieures? Par exemple, moi je me souviens, que tu avais réussi ce casse-tête nouveau.
  • Est-ce que je lui nomme ses qualités de cœur avec des exemples concrets? Par exemple, c’est généreux Laurence d’aller cherche Julie pour jouer avec toi.
  • Est-ce que je favorise le plaisir du jeu coopératif? Par exemple, le jeu de la chaise musicale de façon coopérative, sans gagnant ni perdant.
  • Est-ce que j’évite les activités où l’enfant doit donner une bonne ou mauvaise réponse? Par exemple, j’évite de faire des exercices de scolarisation.
  • Est-ce que je permets à l’enfant d’avoir des moments d’inaction, de repos? Par exemple, avoir un coin pour relaxer, se reposer, rêvasser, etc.
  • Est-ce que je dédramatise l’erreur en parlant de mes propres erreurs? Par exemple, regarde je viens de jeter mes lunettes dans la poubelle; je me suis trompée, je voulais mettre mon crayon brisé…
  • Est-ce que j’ai, dans mon local, des photos qui démontrent les enfants en action? Par exemple, Marie-Luce qui joue à construire une tour. C’est une belle façon de démontrer à l’enfant ses bons coups.
  • Est-ce que je termine une activité graduellement et procède à l’activité suivante par petit groupe? Par exemple, j’invite Sophie et Sébastien à ranger pour aller s’habiller.
  • Est-ce que j’évite de faire attendre les enfants en ligne? Par exemple, lorsque je fais le train pour les déplacements, les enfants sont placés deux par deux. Il y a donc deux premiers et deux derniers…
  • Est-ce que j’accepte les imperfections des enfants? Par exemple, lors du lavage de mains, j’accepte qu’un enfant ait une manche un peu mouillée, si cela n’est pas une contrainte à ses activités.
  • Est-ce que je souligne aux parents les réussites, les bons coups ainsi que les qualités de cœur de son enfant? Par exemple, je te dis que Sébastien est sensible aux petits, ce matin lors des jeux libres, Sébastien a été consoler Francis qui pleurait.

Les interventions de France auprès de l’enfant peuvent aider le parent dans ses compétences parentales. Son rôle n’est pas d’imposer mais de situer les actions de l’enfant dans un contexte développemental afin de recadrer les attentes du parent et le besoin de l’enfant.

Une belle façon pour France de réaliser que la coopération a bien meilleur goût!