Sylvie Bourcier, intervenante en petite enfance

septembre 2012

www.aveclenfant.com

Les recherches démontrent qu’il existe un lien entre la qualité de l’attachement à sa mère et la capacité du très jeune enfant à s’adapter aux relations avec d’autres adultes et d’autres enfants. Si la mère est chaleureuse, fiable, si elle sait répondre à ses besoins physiques et affectifs de façon stable et prévisible, l’enfant acquiert un sentiment de sécurité.  Il devient confiant et convaincu que les adultes peuvent être bons pour lui. La qualité des premières relations facilite donc l’intégration en milieu de garde. L’enfant attaché à ses parents réagit à la séparation du matin. Il pleure, s’agrippe à son parent, peut crier. Il dit à sa façon à ses parents qu’ils sont ses figures d’amour, importantes pour qu’il se sente bien. Mais après le choc de la réalité, alors que le petit comprend que maman ou papa est parti et que cette dure réalité se reproduit tous les jours, vient pour plusieurs, la peur de l’abandon. L’enfant s’inquiète du retour éventuel de son parent.

Le processus d’adaptation se vit de façon différente pour chacun, plusieurs facteurs peuvent d’ailleurs l’influencer et moduler la durée et l’intensité de la réaction de la réalité. La stabilité du personnel est importante pour l’établissement du lien de confiance entre l’enfant et l’éducatrice. Toute nouvelle personne doit être introduite à l’enfant. L’éducatrice doit posséder une sensibilité et des connaissances du bébé qui lui permettent de bien décoder ses besoins et y apporter des réponses adaptées afin de le sécuriser. L’adaptation sera plus facile si l’enfant est intégré à la garderie avant le 6e ou 7e mois alors qu’à 8-9 mois, la peur des étrangers rend l’arrivée en milieu de garde plus difficile.

Le tempérament du bébé joue aussi sur le processus d’adaptation. Certains enfants plus calmes réagiront en dormant davantage alors que les plus actifs risquent de pleurer davantage. Un parent confiant transmet son enthousiasme face à la garderie à son enfant. Peu à peu, l’enfant sécurisé s’intéressera aux jouets, se montrera curieux des activités, des propos de son éducatrice. Certes, certains continueront de pleurer lors du départ mais se laisseront consoler puis distraire par l’éducatrice souriante et calme et par les joyeux lurons actifs autour d’eux. Mais si les pleurs persistent durant plus d’un mois ou réapparaissent, que l’enfant s’accroche à ses parents d’une façon inhabituelle, et qu’il se montre inconsolable, … dont le comportement n’est plus le même au retour des parents, on doit s’inquiéter et observer.

On peut se demander si les réactions de l’enfant sont les mêmes lorsqu’il se fait garder par grand-maman par exemple. Si oui, il peut s’agir de l’insécurité de l’enfant. Si non, le milieu de garde peut être en cause ou l’attitude des parents face à la fréquentation de l’enfant en milieu collectif. Les enfants comme des éponges absorbent, ressentent l’inquiétude de leurs parents.

Les bébés pleurent pour signaler un besoin immédiat ou encore pour évacuer un stress. L’objectif n’est pas d’empêcher le bébé de pleurer mais bien de décoder la source de sa gêne, les causes de son stress. Il se peut aussi que la garderie ne lui convienne pas et qu’un autre mode de garde sera préférable. Quoiqu’il en soit, il ne faut pas négliger les signaux de détresse que l’enfant envoie. Les deux premières années de vie de l’enfant sont cruciales pour l’établissement de liens d’attachement de qualité, base des relations sociales ultérieures. Ne laissons pas nos petits pleurer durant des mois sous prétexte qu’un bébé ça pleure ou qu’il n’y a pas de place ailleurs. Cette détresse doit être entendue, comprise et apaisée. Il vaut mieux consulter et être rassuré que de négliger et ainsi laisser des blessures profondes marquer le petit. Le Chu Sainte-Justine offre d’ailleurs les services d’une Clinique d’attachement.

Bibliographie

Baron, C. (2001) Les troubles anxieux expliqués aux parents. Éditions Hôpital Sainte-Justine.

Bourcier, S. (2004) Les gros chagrins du matin dans Comprendre et guider le jeune enfant à la maison, à la garderie. Éditions Sainte-Justine.

Gauthier, Y, Fortin, G., Jeliu, G. (2009) L’attachement, un départ pour la vie. Éditions Hôpital Sainte-Justine.

Martin, J., Poulin, C., Falardeau, I. (2003) Le bébé en garderie. Presses de l’Université du Québec.

Salter, A. (1999) Pleurs et colères des enfants et des bébés. Jouvence Éditions.