Comment agir face aux jeux téméraires des enfants ?

Est-ce que je le (la) laisse faire ? Est-ce que je le lui interdis ?  Voilà les questions que se posent plusieurs adultes en présence d’un enfant qui se prête à des jeux aventureux.  Bien entendu, notre plus grande préoccupation est d’assurer sa sécurité, mais comment y arriver sans constamment freiner ses initiatives sachant qu’il est tout à fait naturel pour l’enfant d’explorer et de prendre certains risques ? C’est ainsi qu’il apprend à connaître ses propres limites et celles de l’environnement dans lequel il évolue.

Voyons les jeux aventureux comme des situations d’apprentissage pour l’enfant.  Ainsi, on se rendra vite à l’évidence que la prise de risque est souhaitable pour son développement.  Bien entendu, tant que les inconvénients susceptibles de survenir restent mineurs, comme le fait de se cogner le genou ou de s’érafler la peau.  Ses expériences comportant certains risques, si elles sont accompagnées de l’adulte bienveillant, l’amèneront à résoudre des problèmes, à comprendre des phénomènes, à se poser des questions, à relever des défis, à être attentif aux risques et dangers, à expérimenter différents mouvements, à exprimer ses émotions comme la peur ou la fierté, à percevoir ses limites et à demander de l’aide, à anticiper et prévoir les conséquences possibles, etc.  En bref, en explorant son environnement, il va acquérir des connaissances et des habiletés, il va développer sa confiance et son autonomie en relevant des défis adaptés à ses capacités et il sera fier de ses accomplissements.

D’instinct, l’enfant utilise ses réflexes d’autoprotection et agit avec prudence.  Ainsi, il prend généralement la décision de relever des défis avec lesquels il est à l’aise et dont le risque est acceptable pour lui.  S’il ne se sent pas en confiance, il rebroussera chemin et abandonnera probablement son idée, ce qui évite qu’il se mette en danger par lui-même.  Lorsqu’on observe qu’il est à l’aise et en contrôle de la situation, il est souhaitable de demeurer à l’écart tout en lui démontrant notre disponibilité.  Il comprendra qu’on lui fait confiance, qu’il peut explorer et revenir vers l’adulte s’il en ressent le besoin.  Puis, en l’observant avec bienveillance, il devient alors plus facile de déterminer quand intervenir et quel niveau d’aide lui offrir.

Une des façons de l’accompagner est de l’aider à nommer ce qu’il vit et soutenir sa réflexion quant à ses choix en le questionnant sur ses moyens utilisés, ses stratégies mises en place pour résoudre des problèmes, ses émotions, ses intentions, etc.  En posant des questions à l’enfant, nous l’aidons à se situer dans son environnement, à se responsabiliser dans la prise de risque tout en l’amenant à développer ses propres stratégies d’autoprotection.  Ainsi, il deviendra de plus en plus habile à évaluer lui-même les différentes situations, les risques qui y sont associés et à appliquer les règles adaptées à des contextes variés. 

Par ailleurs, différents environnements sont favorables pour permettre à l’enfant d’expérimenter ses jeux aventureux et téméraires.  Pensons aux environnements extérieurs qui permettent à l’enfant de stimuler ses sens.  En effet, les éléments que l’on retrouve en nature permettent à l’enfant de vivre un éventail riche d’expériences de toutes sortes.  Le contact direct avec la nature lui permet de relever des défis adaptés à ses capacités.  Il aura entre autres la chance de se déplacer sur différentes surfaces (gazon, terre, etc.) ou à différents endroits (colline, sentier en forêt, trottoir urbain, etc.), d’expérimenter son équilibre sur un tronc d’arbre au sol, de découvrir avec ses petits doigts ce qui se trouve au creux d’un tronc d’arbre, de transporter de petits et gros cailloux, de regarder son reflet dans la flaque d’eau, de construire des cabanes à l’aide de branches, d’observer une fourmi qui se rend à la fourmilière, etc.   Il y retrouve tout ce qu’il faut pour assouvir sa curiosité et mettre en œuvre des jeux créatifs.  Les jeux libres et actifs sont également des contextes favorables qui lui permettront de bouger librement, de dépenser son énergie et de se réaliser dans des jeux de toute sorte selon ses propres intérêts.

Certains jeux téméraires peuvent aussi être le résultat d’interdits à répétition.  En effet, trop d’interdits peuvent provoquer l’effet contraire en amplifiant le comportement que l’on désirait voir disparaître.  Je m’explique !  En freinant régulièrement les initiatives de l’enfant et lui interdisant constamment de prendre certains risques, l’enfant n’aura pas la chance d’apprendre de ses propres actions, mais devra plutôt se conformer aux exigences de l’adulte.  Il sera alors tenté de vérifier si ces demandes sont légitimes.  Il sentira le besoin de constater par lui-même les conséquences associées aux interdits et de ce fait le comportement que l’on désirait éliminer risque de s’intensifier.  C’est donc à nous, adultes, de trouver l’équilibre entre nos comportements et attitudes où on laisse l’enfant prendre des risques librement et ceux où l’on a tendance à le surprotéger. En revanche, il faut intervenir pour assurer un environnement sécuritaire et avec fermeté si un danger réel est présent.

Avant d’interdire certaines initiatives ou certains jeux, il est primordial de se référer à nos connaissances que nous avons de l’enfant (son tempérament, la maîtrise de certaines habiletés, ses expériences et tentatives antérieures, etc.) afin de déterminer si oui ou non sa sécurité est en jeu.  Rappelons-nous également, lorsque nous étions nous-mêmes enfant, nos petites aventures et expériences comportant certains risques, mais où les bénéfices étaient plus grands que les inconvénients susceptibles d’arriver (le plaisir de prendre des risques, la fierté du dépassement de soi, la confiance en soi face au contrôle de la situation, etc.).  Finalement, gardons en tête que l’enfant apprend dans l’action, de ses erreurs, à travers plusieurs tentatives et expériences, tout comme nous l’avons également fait, enfant.  Cela nous aidera à mieux comprendre les motivations qui l’animent et son intérêt naturel pour la prise de risques.

Sylvie Garceau, enseignante et formatrice